On me parle d’absolution collective …

Confession

On me parle d’absolution collective…

Plusieurs fois des personnes, évoquant un proche passé, me disaient : « mais avant, il y avait des célébrations pénitentielles où tout le monde recevait le pardon ». Mes interlocuteurs semblaient regretter que ces célébrations ne se fassent plus.

Si on ouvre le rituel du Sacrement de pénitence[1], l’Église propose trois manières de célébrer le sacrement de la réconciliation.

  1. Pour réconcilier un seul pénitent. C’est la confession individuelle. Nous la proposons de manière régulière les vendredis soir et samedi matin à l’église Saint Pierre.
  2. Pour réconcilier plusieurs pénitents avec confession et absolution individuelles. Nous proposons cette forme lors du Carême et de l’Avent. Il s’agit d’une liturgie de la Parole suivie d’une confession individuelle de ses péchés pour en recevoir personnellement « l’absolution », c’est-à-dire le pardon.
  3. Pour réconcilier plusieurs pénitents avec confession et absolution générales. C’est de cette dernière manière que nous voulons parler et qui, parfois, est regrettée par quelques-uns. Pourquoi nous ne la proposons pas ?

 

  1. Comment recevoir le pardon habituellement ?

La forme C du sacrement de la Réconciliation est aussi appelée « absolution collective », ou « absolution générale ». Ce rite sert à réconcilier plusieurs personnes en même temps avec le Seigneur. Mais l’Église encadre très strictement cette célébration : ce n’est pas en effet le mode ordinaire, habituel, de réconciliation.

Voilà ce que dit la loi de l’Église sur la manière ordinaire, habituelle et normale, de confesser ses péchés en d’en recevoir le pardon :

Canon 960 : La confession individuelle et intégrale avec l’absolution constitue l’unique mode ordinaire par lequel un fidèle conscient d’un péché grave est réconcilié avec Dieu et avec l’Église ; seule une impossibilité physique ou morale excuse de cette confession, auquel cas la réconciliation peut être obtenue aussi selon d’autres modes. [2]

Cette règle protège le droit de l’âme humaine à une rencontre personnelle avec Jésus-Christ qui écoute, console, encourage et pardonne. La confession individuelle est en effet le lieu d’une rencontre personnelle à un moment si important où l’homme dévoile le fond de son cœur à Dieu à travers les mains de son Église.

 

  1. Quand pourrait-on recevoir l’absolution collectivement ?

L’Église met des conditions à cet usage :

Can. 961 — § 1. L’absolution ne peut pas être donnée par mode général à plusieurs pénitents ensemble, sans confession individuelle préalable, sauf :

si un danger de mort menace et que le temps n’est pas suffisant pour que le ou les prêtres puissent entendre la confession de chacun des pénitents ;

s’il y a une grave nécessité, c’est-à dire si, compte tenu du nombre de pénitents, il n’y a pas assez de confesseurs disponibles pour entendre comme il le faut la confession de chacun dans un temps convenable, de sorte que les pénitents, sans qu’il y ait faute de leur part, seraient forcés d’être privés pendant longtemps de la grâce sacramentelle ou de la sainte communion ; mais la nécessité n’est pas considérée comme suffisante lorsque des confesseurs ne peuvent pas être disponibles pour le seul motif du grand afflux de pénitents, tel qu’il peut se produire pour une grande fête ou un grand pèlerinage. […].

La loi ajoute au § 2. Que c’est à l’évêque de juger des conditions où l’absolution générale pourrait être donnée.

La Conférence des Évêques de France estime[3] qu’il n’existe pas, en France, de ces cas où se rencontrent cette « grave nécessité » exigée pour donner à tous l’absolution des péchés sans confession individuelle.

Pour donner un exemple de nécessité grave, on peut imaginer le cas d’un ferry qui sombrerait, le prêtre présent à bord pourrait donner durant le naufrage, sans en référer à l’évêque, cette absolution générale des péchés.

L’Église demande,[4] qu’après avoir reçu cette absolution générale sans aveu des fautes, la personne recoure « le plus tôt possible à la confession individuelle ». La conscience en effet a besoin d’être soulagé du péché qui pèse sur elle. Le désir de se confesser individuellement de ses péchés graves doit animer la personne pour que l’absolution reçue soit valide[5].

Conclusion :

Vous l’avez compris, nous n’avons pas le droit d’utiliser ces absolutions collectives. Le faire serait commettre un abus grave[6]. Donner le pardon de Dieu serait en outre invalide pour les personnes qui n’iraient pas ensuite se confesser individuellement : ils auraient donc l’impression d’avoir reçu le pardon sans être pour autant réconcilié avec Dieu et l’Église.

Derrière ces règles, nous voyons le désir de l’Église, « experte en humanité », de permettre à chacun de rejoindre le Christ de manière personnelle[7] dans un échange privilégié et adapté au chemin de vie. A l’époque des accompagnements personnalisés, de l’insistance sur la rencontre, la proximité, l’Église se trouve être en avance dans l’accompagnement des personnes et la promotion du dialogue.

 

Abbé Louis-Emmanuel Meyer

 


[1] Célébrer la pénitence et la réconciliation, rituel, éditions Chalet-Tardy, Paris 1978 et 1991.

[2] Code de Droit canonique, 1983.

[3] BO n°33 (25-02-87) 468-469 ; DC 86 (89) 76.

[4] canon 963.

[5] canon 962.

[6] Cf. Normes pastorales pour l’administration de l’absolution sacramentelle générale, Paul VI, Rome, 16 juin 1972.

[7] Cf. La lettre Motu Proprio de Jean-Paul II, Misericordia Dei, « sur certains aspects du sacrement de pénitence », Rome, 7 avril 2002, in  http://w2.vatican.va/content/john-paul-ii/fr/motu_proprio/documents/hf_jp-ii_motu-proprio_20020502_misericordia-dei.html