Quel air étrange, pourquoi les statues se sont elles voilées de violet, pourquoi avoir caché ces images qui hier encore orientaient nos prières, stimulaient nos désirs de ressembler, qui à la petite sœur de Lisieux, qui à ce brave curé des Dombes ?
Tout semble triste, comme en une demeure abandonnée, délaissée de ses propriétaires, les meubles couverts de toiles, les bibelots enveloppés contre la poussière des jours. Mais ici, dans l’église, ce n’est pas la poussière que nous craignons, ce n’est pas l’absence des chrétiens qui firent voiler toutes ces images. Mais c’est la volonté de voir la fête de Pâques renouveler nos regards pour les
porter vers le Christ seul.
Nous avons tout caché, tout est dérobé à notre affection, nos sentiments ne savent plus sur quoi s’appuyer : aucune couleur, aucun visage. Les seules masses informes de ces statues couvertes attirent notre regard qui immédiatement se déporte.
Notre regard, nos sentiments, notre affection du beau : tout cela fait carême. Nous jeûnons de voir.
Au cœur de la prochaine semaine sainte, le grand Vendredi ; le prêtre dévoilera la Croix, ce bois par lequel Jésus a voulu nous sauver. Le regard purifié, nous poserons nos yeux sur l’instrument du supplice qui permit le salut de nos vies, nous fixerons cet « arbre » baigné du sang de Dieu, qui nous donne dans chaque
sacrement, des fruits de vie.
Abbé Louis-Emmanuel Meyer